ZOOM SUR " Lève la tête, Wahine " par Pierre Très-Hardy, dramaturge résidant à Tahiti
Lève la tête, Wahine
“Mana Wahine” est bien plus qu’un spectacle de danse. Et le spectacle débute avant même les premiers pas sur scène. Il y a tout d’abord ce visage qui vous accueille, qui vous cueille, dès que vous avez pénétré dans la salle, avant même de vous asseoir. Ce visage géant, tellement expressif, qui dévore l’univers des yeux. L’esprit, le mana, de la femme est là. Puissant et tendre pourtant. Il ne vous quittera plus, désormais. Dès cette seconde vous savez, vous sentez, que vous êtes perdu. Le spectacle a déjà gagné.
La suite est l’histoire folle de la vie, la vraie, celle de la conquête de soi, la conquête de la liberté. Liberté de la femme kaléidoscope, la femme arc en ciel, composée de mille nuances dont chacune fait une femme et dont toutes font La Femme, la Wahine. Il faut ici le talent de six danseuses formidables réussissant la synthèse de toutes les danses et s’unissant pour nous offrir, à elles toutes, l’infinie unité féminine.
Et soudain vous êtes emporté par un spectacle où ces femmes dansent la liberté, les chants crient la liberté, les sons et les musiques battent profondément, organiquement, comme le sang dans les veines ou la lave dans le volcan. Le cri des femmes libres, fières et belles de cette liberté conquise, boucle ce voyage à travers l’humanité, notre humanité. Un voyage qui parle à l’esprit, au cœur, au corps, à l’âme… au mana de chacun.
Tout, ici, est au service de ce dessein : les jeux de lumière et de projections savamment orchestrées, l’utilisation malicieuse et poétique des moindres accessoires, la simplicité dépouillée des décors… un talent exprimé sous toutes ses facettes. Mana Wahine est à l’image de cette femme décuplée, une somme d’arts qui se complètent pour faire de ce spectacle bien plus qu’un spectacle. Un souffle de vie. Un souffle d’esprit. Un mana. Un mana, comme un trésor offert à tous.
Il y a beaucoup plus à voir et à entendre ici que l’on ne peut saisir. Tout s’enchaîne, emporté, envolé, aspiré par le talent du chorégraphe Taane Mete et des danseuses qui rayonnent comme des étoiles au ciel de l’humanité. Décrocher leur liberté comme on décrocherait la lune, voilà le chant éternel des femmes dont le combat se livre toujours, sur bien des fronts et dans bien des cultures.
Non, vraiment, “Mana Wahine” est bien plus qu’un spectacle de danse. Alors, d’où que tu viennes, lève la tête, Wahine. Tu es belle.
Pierre Tre-Hardy
Dramaturge, résidant à Tahiti